Dans un contexte de mois de juillet qui bat tous les records, nous voilà toutes et tous devant un constat : les prédictions des experts sont palpables et cela dans l’hexagone, et en 2022 ! Toutes les tendances et données nous montrent que nous avons et allons battre tous les records de températures mesurées depuis l’invention du thermomètre. Les incendies sont pour la première fois classés en « méga-incendies », les niveaux de sécheresse dépassent tous ceux constatés de mémoire d’agriculteur, les récoltes n’ont jamais été autant touchées par les impacts du climat.
Notre système se retrouve confronté à lui-même, un réchauffement déclenchant un dérèglement climatique. Ce constat vient percuter une actualité nationale et internationale riche, sous le signe de la raréfaction de certains produits, d’une inflation monétaire nous rappelant le siècle dernier et d’un pouvoir d’achat ébranlé comme jamais.
Le gouvernement affiche pour la première fois certains termes jusque-là interdits, mais devant situation inédite, il faut produire les solutions idoines. Je pense ici au mot « sobriété » affiché lors du discours présidentiel du 14 juillet. Cette tendance de faire mieux (ou autant) avec moins se retrouve dans la loi climat et résilience et sa feuille de route censée garantir un changement de modèle à la hauteur des enjeux. Pour autant, les volontés régaliennes et textes le sont-ils vraiment ?
Pourquoi, devant cette situation et ces défis, cette loi pourrait-elle être un échec absolu ? Qu’est-ce qui pourrait changer la trajectoire et donc les résultats ?
La genèse de la loi.
Votée le 22 août 2021, la loi « climat & résilience » traduit une partie des 146 propositions de la (feu) convention citoyenne. L’objectif est ici de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) de 40 % d’ici 2030 à travers des calendriers d’actions et décrets sur plusieurs années, le tout bien sûr dans un esprit de justice sociale.
De nombreuses thématiques sont concernées pour les entreprises, les collectivités, les salarié-e-s et surtout pour les citoyennes et citoyens à travers des ajustements de comportements au quotidien. De la vente en vrac dans les surfaces commerciales, des menus végétariens dans les cantines scolaires, des déplacements en voiture, aux toits végétalisés, la création de zones à faibles émissions de carbone, la mise en place d’une base de données « économique, sociale et environnementale » dans les CSE ou encore la définition d’un délit d’écocide, la loi couvre une palette de solutions qu’il reste à appliquer de façon pragmatique au cœur de la vie de chacun.
Plusieurs décrets ont été validés dès la genèse et d’autres sont en prévision de « publication éventuelle ». Et c’est bien là le principal risque d’échec, le syndrome de gestion d’une action ou projet que l’on connait sous le terme de procrastination.
Échec pour cause de temporalité ?
Sans remettre en cause la volonté d’agir et de bien faire, c’est surtout via la pose des enjeux sur une échelle de temps court qui nous pousse à la réflexion, à la projection de (grosses) difficultés futures.
La régulation d’un climat stable est désormais un enjeu du présent. Les engagements de réductions drastiques de GES sont actés, et ce devant le parlement européen. C’est bien sur la hauteur de la marche et le timing de franchissement de la marche que nos regards se posent, à travers plusieurs inquiétudes.
Que penser d’une tendance de la loi à réduire nos émissions de 40 % d’ici 2030 (1) quand le GIEC nous préconise une réduction de -65 % (2) ?
Que dire devant la temporalité de la potentielle interdiction de publicité sur les voitures les plus polluantes (SUV principalement), sur possible amendement des sénateurs en 2028, soit à 2 ans d’une échéance majeure (l’agenda 2030) ?
Quelle image renvoie-t-on lorsqu’un décret concernant le principe du zéro déchet dans la restauration, avec possibilité du consommateur de venir avec son contenant lors d’une vente à emporter, n’est proposé qu’à la « publication éventuelle » (3) ?
Un compte à rebours est lancé et les experts nous alertent sur le tic-tac sourd. Le dernier rapport de l’IPBES du 8 juillet appelle à l’action urgente. Ce dernier croise 6200 sources scientifiques et dresse l’état des lieux des menaces qui pèsent sur la biodiversité et le climat. L’état d’urgence de ces deux items, dont dépend l’espèce humaine pour manger, se soigner, et vivre, demande d’opérer un « changement transformateur “(4) au plus vite avec toutes les parties prenantes.
Une clé de la réussite : passer (vite) les 5 phases du deuil.
Élisabeth Kübler-Ross nous détaille, en 1969, que pour réaliser un deuil il faut passer intellectuellement par 5 étapes : le déni, la colère, la négociation (marchandage), la dépression et l’acceptation. Aisément applicable sur une conduite du changement, il est essentiel de situer dans ces phases sa position pour accompagner ou se faire accompagner dans cette transition écologique tant citée et souhaitée.
Force est de constater que nous abordons dorénavant les sujets avec des termes communs aux 5 phases. L’éco-anxiété s’est transformée en éco-colère (5) dans beaucoup de milieux, de pays. Le déni sur la situation actuelle est, pourrait-on espérer, derrière nous pour la plupart d’entre nous.
Ces étapes indispensables à la prise de conscience et au passage à l’action sont souvent évoquées lors de la réalisation des ‘fresques’ (climat, biodiversité, numérique…). La mise en place et la réussite de la loi ne pourront se faire que suite à l’adhésion du plus grand nombre, dans le délai le plus court. Nous imaginerons ici une phase de dépression rapide et constructive afin de passer à la séquence suivante qui déclenchera l’engagement massif.
Une pédagogie inclusive, efficiente et rapide.
Dans les clés du succès de cette transformation sociétale, nous retrouvons la mise à niveau des connaissances intrinsèques de la situation, des enjeux et des solutions.
Dernièrement le climatologue Christophe Cassou, nous a rappelé que ‘c’est maintenant qu’il faut limiter la consommation de produit fossile pour combattre le réchauffement climatique. Pas dans trois ans. Parce que chaque tonne de CO2 compte pour limiter la répétition des canicules.’ (6)
Dans sa vision les journalistes ne se montrent pas à la hauteur avec des images antagonistes de certaines situations. Il est vrai que n’importe quel cerveau se retrouve perturbé lorsque, pour aborder le sujet d’une canicule hors normes, on nous montre des images d’enfants souriants dans une piscine ou d’un passant dégustant une glace à la vanille avec un certain plaisir.
Toutes les strates de partenaires devront acquérir un socle de connaissances commun pour réaliser ces objectifs. Ce sujet clé, des objectifs de développement durable 4 & 17, sera sans doute le plus efficace pour une conduite du changement réussie.
Dans les cibles des publics à former de toute urgence, nous avons pu noter les cycles de formations engagés auprès des ministres (7). Formés aux enjeux écologiques, ils seront mieux armés, parleront un langage commun, et pourront ainsi agir et faire agir l’ensemble des couches de la société concernées par cette transformation indispensable et inévitable.
Pour l’anecdote et sans refaire le passé, nous pourrions juste noter que les principaux enjeux climatiques et énergétiques avaient déjà été présentés aux personnalités politiques clés par un certain Jean Marc Jancovici en 2014 (8) et même dès 2012.
Imposons-nous un prisme positif, rassurons-nous que tout est encore possible. Restons optimistes devant les études nous montrant qu’il suffit de 10 % des membres d’un groupe engagés pour entrainer les 90 autres %. Et gardons en mémoire ce dicton de Nelson Mandela : "L’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde."
Sébastien BOLLE
Président RESO2D
1- https://www.vie-publique.fr/loi/278460-loi-22-aout-2021-climat-et-resilience-convention-citoyenne-climat
2- https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/climat/ce-que-dit-le-rapport-du-giec-sur-l-attenuation-des-emissions-de-gaz-carbonique_162681
3- https://www.legifrance.gouv.fr/dossierlegislatif/JORFDOLE000043113774/?detailType=ECHEANCIER&detailId=
4- https://www.novethic.fr/actualite/environnement/biodiversite/isr-rse/alerte-rouge-de-l-ipbes-sur-les-50-000-especes-menacees-dont-depend-l-humanite-150912.html
5- https://reporterre.net/Crise-climatique-passons-de-l-ecoanxiete-a-l-ecocolere
6- https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-enjeux-des-reseaux-sociaux/canicule-les-internautes-se-mobilisent-7013059
7- https://www.novethic.fr/actualite/environnement/climat/isr-rse/les-ministres-et-haut-fonctionnaires-vont-etre-formes-aux-enjeux-ecologiques-150892.html
8- http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20141215/devdur.html#toc5
Notre système se retrouve confronté à lui-même, un réchauffement déclenchant un dérèglement climatique. Ce constat vient percuter une actualité nationale et internationale riche, sous le signe de la raréfaction de certains produits, d’une inflation monétaire nous rappelant le siècle dernier et d’un pouvoir d’achat ébranlé comme jamais.
Le gouvernement affiche pour la première fois certains termes jusque-là interdits, mais devant situation inédite, il faut produire les solutions idoines. Je pense ici au mot « sobriété » affiché lors du discours présidentiel du 14 juillet. Cette tendance de faire mieux (ou autant) avec moins se retrouve dans la loi climat et résilience et sa feuille de route censée garantir un changement de modèle à la hauteur des enjeux. Pour autant, les volontés régaliennes et textes le sont-ils vraiment ?
Pourquoi, devant cette situation et ces défis, cette loi pourrait-elle être un échec absolu ? Qu’est-ce qui pourrait changer la trajectoire et donc les résultats ?
La genèse de la loi.
Votée le 22 août 2021, la loi « climat & résilience » traduit une partie des 146 propositions de la (feu) convention citoyenne. L’objectif est ici de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) de 40 % d’ici 2030 à travers des calendriers d’actions et décrets sur plusieurs années, le tout bien sûr dans un esprit de justice sociale.
De nombreuses thématiques sont concernées pour les entreprises, les collectivités, les salarié-e-s et surtout pour les citoyennes et citoyens à travers des ajustements de comportements au quotidien. De la vente en vrac dans les surfaces commerciales, des menus végétariens dans les cantines scolaires, des déplacements en voiture, aux toits végétalisés, la création de zones à faibles émissions de carbone, la mise en place d’une base de données « économique, sociale et environnementale » dans les CSE ou encore la définition d’un délit d’écocide, la loi couvre une palette de solutions qu’il reste à appliquer de façon pragmatique au cœur de la vie de chacun.
Plusieurs décrets ont été validés dès la genèse et d’autres sont en prévision de « publication éventuelle ». Et c’est bien là le principal risque d’échec, le syndrome de gestion d’une action ou projet que l’on connait sous le terme de procrastination.
Échec pour cause de temporalité ?
Sans remettre en cause la volonté d’agir et de bien faire, c’est surtout via la pose des enjeux sur une échelle de temps court qui nous pousse à la réflexion, à la projection de (grosses) difficultés futures.
La régulation d’un climat stable est désormais un enjeu du présent. Les engagements de réductions drastiques de GES sont actés, et ce devant le parlement européen. C’est bien sur la hauteur de la marche et le timing de franchissement de la marche que nos regards se posent, à travers plusieurs inquiétudes.
Que penser d’une tendance de la loi à réduire nos émissions de 40 % d’ici 2030 (1) quand le GIEC nous préconise une réduction de -65 % (2) ?
Que dire devant la temporalité de la potentielle interdiction de publicité sur les voitures les plus polluantes (SUV principalement), sur possible amendement des sénateurs en 2028, soit à 2 ans d’une échéance majeure (l’agenda 2030) ?
Quelle image renvoie-t-on lorsqu’un décret concernant le principe du zéro déchet dans la restauration, avec possibilité du consommateur de venir avec son contenant lors d’une vente à emporter, n’est proposé qu’à la « publication éventuelle » (3) ?
Un compte à rebours est lancé et les experts nous alertent sur le tic-tac sourd. Le dernier rapport de l’IPBES du 8 juillet appelle à l’action urgente. Ce dernier croise 6200 sources scientifiques et dresse l’état des lieux des menaces qui pèsent sur la biodiversité et le climat. L’état d’urgence de ces deux items, dont dépend l’espèce humaine pour manger, se soigner, et vivre, demande d’opérer un « changement transformateur “(4) au plus vite avec toutes les parties prenantes.
Une clé de la réussite : passer (vite) les 5 phases du deuil.
Élisabeth Kübler-Ross nous détaille, en 1969, que pour réaliser un deuil il faut passer intellectuellement par 5 étapes : le déni, la colère, la négociation (marchandage), la dépression et l’acceptation. Aisément applicable sur une conduite du changement, il est essentiel de situer dans ces phases sa position pour accompagner ou se faire accompagner dans cette transition écologique tant citée et souhaitée.
Force est de constater que nous abordons dorénavant les sujets avec des termes communs aux 5 phases. L’éco-anxiété s’est transformée en éco-colère (5) dans beaucoup de milieux, de pays. Le déni sur la situation actuelle est, pourrait-on espérer, derrière nous pour la plupart d’entre nous.
Ces étapes indispensables à la prise de conscience et au passage à l’action sont souvent évoquées lors de la réalisation des ‘fresques’ (climat, biodiversité, numérique…). La mise en place et la réussite de la loi ne pourront se faire que suite à l’adhésion du plus grand nombre, dans le délai le plus court. Nous imaginerons ici une phase de dépression rapide et constructive afin de passer à la séquence suivante qui déclenchera l’engagement massif.
Une pédagogie inclusive, efficiente et rapide.
Dans les clés du succès de cette transformation sociétale, nous retrouvons la mise à niveau des connaissances intrinsèques de la situation, des enjeux et des solutions.
Dernièrement le climatologue Christophe Cassou, nous a rappelé que ‘c’est maintenant qu’il faut limiter la consommation de produit fossile pour combattre le réchauffement climatique. Pas dans trois ans. Parce que chaque tonne de CO2 compte pour limiter la répétition des canicules.’ (6)
Dans sa vision les journalistes ne se montrent pas à la hauteur avec des images antagonistes de certaines situations. Il est vrai que n’importe quel cerveau se retrouve perturbé lorsque, pour aborder le sujet d’une canicule hors normes, on nous montre des images d’enfants souriants dans une piscine ou d’un passant dégustant une glace à la vanille avec un certain plaisir.
Toutes les strates de partenaires devront acquérir un socle de connaissances commun pour réaliser ces objectifs. Ce sujet clé, des objectifs de développement durable 4 & 17, sera sans doute le plus efficace pour une conduite du changement réussie.
Dans les cibles des publics à former de toute urgence, nous avons pu noter les cycles de formations engagés auprès des ministres (7). Formés aux enjeux écologiques, ils seront mieux armés, parleront un langage commun, et pourront ainsi agir et faire agir l’ensemble des couches de la société concernées par cette transformation indispensable et inévitable.
Pour l’anecdote et sans refaire le passé, nous pourrions juste noter que les principaux enjeux climatiques et énergétiques avaient déjà été présentés aux personnalités politiques clés par un certain Jean Marc Jancovici en 2014 (8) et même dès 2012.
Imposons-nous un prisme positif, rassurons-nous que tout est encore possible. Restons optimistes devant les études nous montrant qu’il suffit de 10 % des membres d’un groupe engagés pour entrainer les 90 autres %. Et gardons en mémoire ce dicton de Nelson Mandela : "L’éducation est l’arme la plus puissante pour changer le monde."
Sébastien BOLLE
Président RESO2D
1- https://www.vie-publique.fr/loi/278460-loi-22-aout-2021-climat-et-resilience-convention-citoyenne-climat
2- https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/climat/ce-que-dit-le-rapport-du-giec-sur-l-attenuation-des-emissions-de-gaz-carbonique_162681
3- https://www.legifrance.gouv.fr/dossierlegislatif/JORFDOLE000043113774/?detailType=ECHEANCIER&detailId=
4- https://www.novethic.fr/actualite/environnement/biodiversite/isr-rse/alerte-rouge-de-l-ipbes-sur-les-50-000-especes-menacees-dont-depend-l-humanite-150912.html
5- https://reporterre.net/Crise-climatique-passons-de-l-ecoanxiete-a-l-ecocolere
6- https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-enjeux-des-reseaux-sociaux/canicule-les-internautes-se-mobilisent-7013059
7- https://www.novethic.fr/actualite/environnement/climat/isr-rse/les-ministres-et-haut-fonctionnaires-vont-etre-formes-aux-enjeux-ecologiques-150892.html
8- http://www.senat.fr/compte-rendu-commissions/20141215/devdur.html#toc5